SAINT-MARTIN-DU-BEC. Eriamel (Thierry Lemaire), Serge Mogère signent une BD historique sur la bataille de Gergovie saluée par de nombreux spécialistes.

L’album « GERGOVIE » termine la saga « AssoR BD » puis « AssoR.Hist & Bd » commencée il y a plus de trente ans. En effet, fin 2018, la première maison associative éditrice d’album BD cessera son activité. Pour terminer en beauté, deux de ses piliers, Serge Mogère et Eriamel (Thierry Lemaire) ont donc décidé de tenter l’aventure Antiquité, en effet on les connaissait plus friands d’histoires médéviales de spécifité bien normande, avec cet album.

Eriamel précise : « Pour terminer, c’est donc tout naturellement que nous avons pensé faire une « sortie » plus médiatique pour un album qui décrit des pages de la grande histoire de France. Nous voulions également trouver un coéditeur, ayant une arrière pensée pour l’après Assor. Orep, qui coédite « Gergovie » pourrait être pressenti pour la pérennité de plusieurs de nos albums et nous avions déjà publié un « Alésia » auparavant. Les auteurs sont partis des écrits de César et ont composé le scénario et le dessin en tenant compte des dernières découvertes archéologiques mais aussi des conseils machines de siège que leur a fourni les chercheurs de l’Université de Caen. Les deux complices ont concocté leur histoire qualifiée d’originale et plausible par de nombreux spécialistes (archéologues, conservateurs et chercheurs) auxquels ils avaient proposé quatre postulats pour interpréter les silences et les incohérences du texte de César, oeuvre de propagande du général romain tout en tenant compte des toutes dernières découvertes archélogiques sur le terrain. Très vite, les archéologues ont salué leur sérieux mais aussi leur audace jugée plausible. « Au départ, je travaillais sur les Romains et Eriamel sur les Gaulois » se souvient Serge Mogère. Les scénaristes se sont ensuite rapprochés du rennais Bruno Marivain qui s’est chargé de crayonner les planches de l’album, ensuite un peu plus de la moitié des planches ont été encrées par le jurassien Jean-Marie Woehrel, qu collabore avec l’association AssoR.Hist & Bd depuis de nombreuses années.

Rendre aux Gaulois ce qui n’appartient pas à César…

Pour se faire les deux scénaristes sont partis en Auvergne et visité tous les sites avec des archéologues, et c’est ainsi qu’ils ont découvert qu’à l’époque de la Guerre des Gaules, il n’y avait pas qu’une cité gauloise (Gergovie) qui se présentait à César, mais… trois (Gergovie, Gondole et Corent) très proches l’une des autres. Voilà le point de départ, et l’idée de « corriger » le texte de César n’était pas pour déplaire aux auteurs. Très vite, ils ont détecté les mensonges (souvent par omission) du rédacteur du « Commentaire de la guerre des Gaules ». Coup de chance, autour de Gergovie, sur plusieurs sites ont été découverts des zones de combats (pointe de scorpion, fer de lance, morceaux de casques…), l’étude de la topographie permettant également d’envisager des hypothèses. « Une grande précisiion, c’est l’appréciation qui ressort immédiatement à la lecture de cet album », c’est ainsi que Vincent Guichard, directeur général du centre archéologique européen de Bribracte commente l’album.

Le souci du détail et des hypothèses jugées plausibles…

Si l’ouvrage s’apprécie aussi dans le souci du détail, génie civil des camps romains, machines de sièges romaines, costumes, paysages, reconstitution des sites, il s’apprécie également pour les hypothèses qu’il propose : Vercingétorix ne serait pas le chef supême, faire valoir voulu par César, mais un chef prenant avis d’un conseil de chefs, parmi lesquels, Commios l’Astrébate que les auteurs présentent comme l’éminence grise et Luctérios, l’autre bras droit de Vercingétorix, Luctérios ralliant les peuples des contreforts sud du massif central. Mais ils vont plus loin, partant des dernières découvertes archélogiques de Gondole, la cité située juste en bas de Gergovie, dans la plaine, au bord de la rivière Allier, ils ont réinterprété la fin de la bataille, bien différente des écrits césariens, Eriamel précise : « César évoque trois jours de combats de cavalerie puis indique qu’il passe la rivière. Nous n’avons trouvé qu’un seul point de passage possible. Avant d’arriver à Gergovie, César avait traversé l’Allier à cinq jours de marche plus au nord, en rusant pour ne pas trouver l’armée gauloise face à lui. Avec une armée affaiblie, il lui faut construire un pont à l’abri des attaques. Trois jours par contre c’est juste ce qu’il faut pour construire une passerelle et faire passer à leur rythme 45 000 à 50 000 hommes, 18 000 à 20 000 équidés, 3 000 à 5 000 chariots… bien à l’abri du mur d’enceinte. » Cette enceinte visible de nos jours et encore haute d’une dizaine de mètres entoure le site Gondole, endroit bien connu de Yann Deberg, archéologue protohistorien – Inrap « L’ouvrage est précis, détaillé, documenté et livre une version, plus que plausible, du déroulement de la bataille de Gergovie. Cet ouvrage, fruit d’une collaboration étroite entre monde de la BD et celui de l’archéologie, permet une plongée dans la guerre des Gaules » et il n’est pas le seul, une dizaine de spécialistes vantent la qualité de l’ouvrage. La transmission des connaissances n’a pas été facile, le normand Eriamel après chaque débat téléphonique et internet avec les archéologues, retransmettant les informations au rennais Bruno Marivain, a du se rendre à Rennes, au début de l’année pour repasser tous les crayonnés des planches en revue. Pas simple, certains dessins commençant alors que les sites venaient à peine de livrer leur secret. Bruno Marivain en sait quelque chose. « Pas facile de dessiner quand on n’a pas soit-même vu le site, c’est ainsi que pour les premières représentations de la porte sud de l’oppidum de Gergovie, j’ai été amené à la dessiner plusieurs fois »; Un album de haute qualité qui comblera tous les passionnés d’histoire.

Gergovie, 18,90 euros TTC.
www.assorbs.com
tel 02 35 55 79 06

Le Côte d’Albâtre